Ouvrir la Protection de l’enfance à la société civile. Si l’idée n’est pas nouvelle, ACTION ENFANCE veut saisir l’intérêt grandissant des donateurs et entreprises pour la cause de l’enfance en danger. Les enjeux sont considérables, tant en termes de qualité de l’accompagnement des enfants que de constitution d’un capital social. En mobilisant ces énergies extérieures, c’est l’avenir des jeunes confiés à la Fondation que l’on construit.
Pour comprendre pourquoi la Fondation recherche le soutien de bienfaiteurs – donateurs, testateurs, entreprises et fondations – afin d’assurer pleinement sa mission auprès des enfants et des jeunes qu’elle accueille, il faut connaître le mode de financement des Villages d’Enfants et d’Adolescents. Au titre de l’Aide sociale à l’enfance, les Conseils départementaux versent à la Fondation des prix de journée, qui couvrent l’essentiel des dépenses liées à l’éducation des enfants. Toutefois, en fonction des budgets accordés par les Départements, certaines activités sportives et culturelles, une partie des dépenses liées aux vacances, des études dans des établissements privés ou encore l’aide aux devoirs ne sont pas totalement couverts par ce budget. Ni les prises en charge médicales hors médecine conventionnée, structures hospitalières ou centre médico-psychologique (CMP). Or pour ACTION ENFANCE, ces dépenses sont indispensables pour accompagner dans les meilleures conditions les enfants et les jeunes, les aider à se construire un capital social et à se préparer à s’insérer dans la société. La générosité des donateurs, comme celle des partenaires mécènes, prend là tout son sens.
Les enfants et adolescents accueillis par ACTION ENFANCE vivent pour la plupart avec les conséquences de traumas et sont pour certains en grande difficulté psychologique. Ils ont besoin de soins – que l’on prenne soin d’eux et qu’on les aide à se soigner. Lorsqu’une prise en charge thérapeutique est nécessaire, il s’agit souvent d’un cas d’urgence. Or il faut des semaines, voire des mois, pour obtenir un rendez-vous dans un CMP. Les consultations auprès d’un psychologue ou d’un psychiatre en ville, les séances d’équithérapie ou encore les séjours AGILE et l’accompagnement par les référents ACTION+ ne seraient pas possibles sans des fonds privés. Aider à grandir, c’est aussi ouvrir l’enfant sur le monde extérieur et lui permettre de se projeter hors du Village ACTION ENFANCE. Les vacances, notamment, font partie du projet éducatif. La générosité du public vient compléter l’allocation publique dédiée aux vacances, qui peut s’avérer trop juste pour emmener un groupe d’adolescents à Rome ou à Berlin. Or ces voyages, que les jeunes gens contribuent à organiser, sont autant d’occasions de vivre des expériences « comme tout le monde », pas seulement en colonie de vacances, et de renforcer l’estime de soi. Enfin, comment envisager de devenir un adulte socialement intégré, si l’on n’a pas acquis les codes sociaux « du dehors » et si l’on n’a personne sur qui compter. « Se constituer un capital social est essentiel pour les enfants et les jeunes que nous accompagnons. Or c’est principalement avec des personnes extérieures, qui ne sont pas rémunérées pour s’occuper d’elles, qu’ils pourront le créer et l’enrichir », insiste Marc Chabant, directeur du développement de la Fondation.
Chacun, particulier comme entreprise, peut s’investir dans la cause de l’enfance, à son échelle. La fidélité de ses donateurs constitue un socle essentiel à la mission menée par ACTION ENFANCE au travers de leurs dons et libéralités (legs, assurance-vie et donations). « Cette générosité représente près de 14 % du budget de la Fondation. Elle est indispensable pour garantir un accompagnement de qualité, prévoir nos actions et nous en sommes extrêmement reconnaissants », souligne Marie Blondel, responsable marketing et collecte de fonds d’ACTION ENFANCE. Au-delà de l’aspect financier, les bénévoles qui animent des ateliers dans les maison ou assurent du soutien scolaire, ou encore les parrains et marraines qui l’engagent dans la durée auprès d’un enfant ou d’une fratrie, déploient une générosité très utile aux enfants. Les entreprises, de plus en plus nombreuses à intégrer des considérations sociales, environnementales ou éthiques ,dans le cadre d’une démarche RSE, se montrent, elles aussi, sensibles à la cause des enfants. « Dans la recherche de partenariats, la priorité absolue est de répondre le plus précisément possible aux besoins des enfants. Lorsqu’un projet est pertinent, nous faisons le lien entre les entreprises qui souhaitent financer et réaliser des projets et les responsables des Villages d’Enfants et d’Adolescents. Enfin, nous sommes soucieux de la question du capital social : les ateliers et autres animations doivent permettre de créer des interactions, produire une relation de qualité entre les collaborateurs de nos partenaires et les enfants et/ou les adolescents », exprime Benoit Réveillon, co-responsable des partenariats avec Cécilia Logel.
Le monde de l’entreprise et celui de la jeunesse sont trop souvent séparés par un fossé de compréhension ou de méconnaissance. Je suis convaincu que les entreprises peuvent apporter à ACTION ENFANCE une passerelle entre l’activité économique et l’éducation. Cela peut se traduire par du financement – et nous en avons besoin – mais aussi par des propositions de stages, des visites d’entreprise, du mécénat de compétences, du mentorat ou encore par l’intervention de l’entreprise au sein du Village d’Enfants et d’Adolescents. C’est le cas lorsque des salariés viennent aménager une bibliothèque ou animer un atelier par exemple. Par ailleurs, dans un contexte de marché du travail tendu, un partenariat avec le monde de la Protection de l’enfance et de la jeunesse met en lumière l’implication sociale de l’entreprise et son impact RSE. C’est un gage d’attractivité pour l’entreprise. Elle se donne aussi les moyens d’intéresser au plus tôt la jeune génération à son domaine d’activité. C’est un travail à moyen terme. Enfin, si les entreprises ont l’opportunité de connaître nos Villages de l’intérieur, elles seront sensibilisées aux parcours de vie atypiques des jeunes postulants et auront probablement une approche différente pour faciliter l’intégration de ces nouvelles compétences. La diversité fait la richesse des entreprises.
Pour répondre aux besoins des enfants et leur apporter ce supplément d’âme, ce sont d’abord des fonds supplémentaires que doit trouver ACTION ENFANCE. La Fondation bénéficie ainsi, par exemple, d’une partie de l’épargne collectée sur la plateforme solidaire « Axa Au Coeur des Territoires ». Les fonds sont principalement alloués au financement d’ACTION+, le dispositif d’après placement de la Fondation, pour de la formation et de l’accès à l’emploi. « Dans la continuité de ce partenariat, nous avons ainsi été sollicités pour organiser une journée “Prévention vélo au coeur des territoires” animée par des agents et inspecteurs Axa Prévention au Village d’Amilly, dans le Loiret. Au-delà de l’aspect pédagogique de l’animation, nous avons pu observer que des conversations s’établissaient, des liens se nouaient », relève Benoit Réveillon. Ce type de journée est l’occasion pour les enfants de s’ouvrir à d’autres horizons mais aussi pour les collaborateurs des entreprises partenaires de rencontrer des personnes qu’ils n’auraient sans doute jamais côtoyées autrement. C’est du gagnant-gagnant. « Le fait pour les membres d’une entreprise ou d’une fondation mécène de passer du temps au quotidien dans un Village et de rencontrer les enfants est très positif. Ils peuvent ensuite d’autant mieux en parler à leurs collègues ou et à leurs clients », commente Cécilia Logel. Enthousiastes, les collaborateurs Axa présents ce jour-là ont proposé de réitérer ce programme dans d’autres Villages, sur d’autres territoires.
Notre ligne de conduite : travailler en coordination avec nos partenaires pour que cela serve chacune des parties prenantes. Mais, toujours, en partant des besoins des enfants.
En dehors du soutien inconditionnel promis par ACTION ENFANCE, près d’un enfant sur deux n’aura qu’un seul adulte, voire aucun sur qui compter à sa sortie de placement. Le parrainage contribue à sécuriser le parcours des enfants confiés, en favorisant la création d’une relation riche de sens, appelée à s’inscrire dans le temps, entre un enfant et son parrain ou sa marraine. Au fil des mois et des années, les liens se renforcent, les enfants prennent de plus en plus part à la vie de la famille, à ses loisirs, à ses événements heureux. Ils découvrent ainsi ce que peut être une vie « ordinaire », font l’expérience des relations intergénérationnelles, apprennent la réciprocité. Soixante conventions de parrainages ont déjà été signées par la Fondation. Les entreprises, quant à elles, ont un rôle de premier plan à jouer dans la formation et l’insertion professionnelle. « Au-delà du soutien financier versé à ACTION+, nous observons que les entreprises souhaitent s’impliquer dans l’évolution des situations », explique Moner Boulacheb, responsable du dispositif ACTION+. Elles sont alors volontaires pour accompagner les jeunes via du mentorat, à l’instar de Fortil et Twelwe Consulting. « Le mentorat est un moyen très concret d’élargir le champ des possibles pour les jeunes, de leur ouvrir de nouveaux horizons grâce aux connaissances et au partage d’expérience que livre le mentor mais aussi à la valorisation des compétences qui renforce l’estime de soi. » C’est aussi une occasion fantastique de permettre la rencontre entre deux personnes qui avaient peu de chance de se croiser et de favoriser la construction d’un capital social. « Nous restons dans le circuit, faisons tiers, pour assurer le succès du mentorat. Il en va de l’avenir des jeunes que nous accompagnons. » Une autre manière pour les entreprises de s’impliquer dans l’avenir professionnel a été initiée par Smurfi t Kappa. Chaque mois, le fabricant d’emballages en carton transmet aux référents ACTION+ la liste des postes à pourvoir. Charge à eux de les transmettre aux jeunes gens en fonction de leur projet professionnel. « Ce qui nous intéresse dans les partenariats avec des groupes comme Vinci Construction, Les Mousquetaires ou Smurfit Kappa, c’est leur implantation nationale et donc une certaine proximité avec le domicile des jeunes que nous aidons », complète Moner Boulacheb. Le mentorat peut également passer par le biais d’associations dont la mission est l’immersion dans le milieu professionnel.
ACTION ENFANCE expérimente ainsi cette filière avec l’Association Jeunesse et Entreprises. « À nous d’explorer de nouvelles pistes pour ouvrir les jeunes au monde extérieur, et notamment professionnel », soutient le responsable ACTION+.
Dans l’Aisne, le dispositif de parrainage résulte d’un partenariat entre ACTION ENFANCE et le Conseil départemental. Depuis sa mise en place en mars 2022, 23 relations de parrainage sont effectives et/ou dans la consolidation du lien, dont 13 au sein du Village d’Enfants et d’Adolescents de Soissons. « Les parrains se projettent sur du long terme. Nous sentons leur volonté d’accorder une vraie place aux enfants dans leur vie. Quant aux enfants et aux jeunes, ils peuvent faire l’expérience d’une vie de famille, avec sa manière de vivre, ses relations intrafamiliales, ses codes. Rapidement, ils sont invités aux fêtes de famille, aux déjeuners dominicaux. Leur parrain ou marraine fêtent leur anniversaire, les emmènent au musée, voire en vacances, les accompagnent dans leur scolarité ou leurs choix professionnels. Nous observons des effets très positifs dans la plupart des cas. Les liens qui se créent au sein du parrainage contribuent parfois à apaiser les enfants sur leur lieu de vie, à adoucir leur relation avec les autres, les ramènent dans une forme de normalité. Ils ont enfin le sentiment d’être des enfants comme les autres. Mais cela ne va pas de soi : ces enfants, qui sont dans une carence affective parfois sévère, doivent apprendre à être “ordinaires dans une relation ordinaire”. Avec une forme de réciprocité avec laquelle ils ne sont pas familiers. Mais plus la relation est nourrie de chaque côté, plus elle devient solide. Tu comptes pour moi ; tu peux compter sur moi ! », analyse Jamela Ben Alla, référente parrainage au Village ACTION ENFANCE de Soissons, pour
le Département de l’Aisne.
La notion d’ancrage dans le territoire prend une place croissante et les partenariats correspondent toujours à un projet précis : entreprises et fondations savent comment leurs fonds seront utilisés. Par exemple, la Fondation de France a contacté ACTION ENFANCE au nom de la Fondation Marie-Rose Blanc placée sous son égide. Celle-ci avait la volonté d’investir dans la construction du nouvel écoVillage de Chinon. Le projet était déjà financé par le Département d’Indre-et-Loire, mais il s’avérait qu’après clôture de l’appel à projet, la capacité du service de semi-autonomie méritait d’être accrue. « Les fonds ont été orientés vers la création de quatre places supplémentaires offrant à quatre autres adolescents la possibilité de vivre dans un environnement pensé pour les aider à prendre leur envol, souligne Jamel Senhadji, directeur de l’écoVillage de Chinon. Cette coopération avec la Fondation de France est révélatrice de notre mobilisation pour rechercher des financements privés sur notre territoire. » L’intérêt de partenaires privés pour les actifs immobiliers s’était déjà manifesté en 2020 : Smurfit Kappa et sa fondation avaient alors permis l’acquisition du terrain du Village d’Enfants et d’Adolescents de Sablons, en Gironde, et soutenu la construction de l’écoVillage. Partenaire pérenne, Smurfi t Kappa a confirmé, en septembre 2024, le financement d’équipements de plein-air à Chinon et au futur écoVillage de Tigy, dans le Loiret. « Obtenir l’investissement de partenaires privés sur le volet patrimonial est un véritable enjeu, relève Marc Chabant. Avec l’accélération du développement de l’accueil de fratries, les créations de Villages ne peuvent plus être financées uniquement sur fonds propres. Quant aux prêts financiers que nous devons à présent souscrire, le remboursement des intérêts mobilise des capitaux que nous préférerions mettre au service des enfants, des jeunes et des anciens que nous accompagnons. ». L’appel est lancé !